Roman d'amitié

Vous voyez l’autre là, mais si, celle qui écrit sur les mêmes sujets que moi. Qui divise mon temps de parole par deux. Nanette ouais c’est ça (quel surnom idiot. Ah merde, c’est moi qui l’ai trouvé). Bon. Je la connais depuis 7 ans, soit un tiers de ma vie.

Elle a l’immense privilège d’être l’une des seules personnes pour laquelle je me souviens parfaitement de ma première impression. Laissez-moi vous expliquer comment ça partait topdéliremégagroove de l’amour éternel : « C’est qui celle-là ? Elle a une tête bizarre. Purée elle est narcissique… et prétentieuse c’est hallucinant… D’ailleurs, je vois pas pourquoi, y a rien sur quoi se vanter ». Bref, le coup de foudre.

Et le destin, qui par moments semble vraiment savoir ce qu’il fait, nous a (ré)unies (mais nan, pas par les liens sacrés du mariage). Chacune auréolée de sa sociabilité légendaire, nous avons du nous fréquenter et traîner dans le même groupe d’amis. C’est au milieu de gens qui ne nous aimaient pas que nous avons découvert que nous étions faites pour nous entendre. Nous avons en effet, cette caractéristique commune d’assumer un sens aigü de la critique d’autrui. Pas autrui qui n’y peut rien (ou alors avec toute l’ironie possible et imaginable), autrui qui la cherche (la critique – suivez un peu !). Elle comme moi faisons d’ailleurs partie des gens sujets à la critique pour cause de forte personnalité. Nous sommes, de ce fait, jugées trop hâtivement et à tort par 95% de ceux qui nous approchent pour la première fois (y compris nous-mêmes !!). Point commun qui nous lie à la vie à la mort ! :D

Nous aimons critiquer oui. Mais attention, pas de ça entre nous. Si par un incroyable hasard j’ai envie de la secouer, la frapper, lui donner des coups de pieds, l’étrangler, la couper en petits morceaux puis faire une tourte avec, bref, lui faire du mal, j’évite astucieusement le drame (et la prison à perpétuité) en lui disant ce qui ne va pas (et vice-versa). Puis nous tournons vigoureusement la page pour le chapitre suivant.

J’en viens alors au « pourquoi Nanette est ma meilleure amie ». Simple : parce que je lui fais confiance, et parce que je sais que sa franchise envers moi est totale. Pas de coup de poignard dans le dos, pas d’hypocrisie, de trahison. Je pourrais même lui donner mon code de carte bleue s’il fallait vous donner une preuve !!! (bon ok… elle a une mémoire de poisson rouge et l’oublierait en 10 secondes chrono ; le temps de chercher son calepin, mais quand même)
L’amitié avec elle passe par ça : l’honnêteté totale, sans avoir peur de la perdre, afin d’avoir toujours la conscience sereine et les jauges « critique » et « rancœur » à zéro.

Et puis l’autre composante importante qui s’est instaurée entre nous, c’est la complicité. Prévoir ses réactions, trouver des sujets de conversation sans même y réfléchir, ne pas craindre non plus de ne rien avoir à se dire ; « oh my godness ça y est on s’ennuie ensemble, c’est la fiiiiiin ».

La complicité comme la confiance ont demandé du temps et une communion de pensée élevée pour se mettre en place. Mais elles sont, en ce qui m’opinionne, les deux éléments qui font de mon amitié avec Nanette une amitié stable et reposante.
[Bon il va de soi, que si elle est en ce moment même en train de fomenter un plan contre moi et de me critiquer ; et que je suis amenée à l’apprendre, les bases de notre amitié seraient sapées.] (Je te mets la pression là non Nanette ??)

Si vous me dites là maintenant : « fais un reproche à Nanette », je n’en ai aucun qui me vient. C’est en effet une des rares personnes contre qui je n’ai pas de grief refoulé car je les lui expose, puis ils sortent d’eux-mêmes de mon cerveau. En fait, quand je dis « une des rares »… les autre rares, ce sont les membres de ma famille.

A l’instar de ma sœur, ma mère, ou ma grand-mère, Nanette est la seule autre personne que je n’ai pas peur de perdre. J’ai cette sorte de certitude qu’elle sera toujours là. Avec des hauts, des bas, c’est évident avec deux caractères de cochon comme les nôtres, mais présente. Comme ma famille. A force de réflexion, je pense avoir compris le fond de la chose. Qu’importe ce que je fais, erreur ou réussite, choix A ou choix B, elle ne me jugera pas, elle essaiera de comprendre et me conseillera. Comme ma famille.

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J'ai toujours eu le sentiment que l'immense privilège de l'amitié est de ne rien avoir à expliquer. Katherine Mansfield   
Comme c’est agréable de comprendre une personne par un simple échange de regard. De savoir que ce haussement de sourcils signifie qu’il vaut mieux changer de sujet, que celui-là veut dire de ne pas insister… Ou encore que celui-là veut dire que le mec d’en fasse est hachement sexy !!!

Voilà comment je me sens avec C² ! Et franchement au début c’était pas gagné !

La seule amitié qui vaille est celle qui naît sans raison. Arthur Van Schendel, extrait de Un vagabond amoureux.
Déjà physiquement elle est le jour et moi la nuit. Ma première impression était : « Squ’elle peut être insipide celle-là… C’est quoi son nom ? Bof peu importe j’irai jamais lui parler de toute façon. » (Oui à l’époque une grande motivation animait mon regard lubrique) Bon au final j’ai mis plus de temps à apprendre son prénom qu’à l’apprécier !

L'éloignement et la longue abscence nuisent à toute amitié. Arthur Schopenhauer, extrait des Aphorismes sur la sagesse de la vie.
Attention attention ! Âme sensible s’abstenir ! Voici la séquence émotion !

Ensuite au fil du temps on s’est éloigné, et plus revu, là normalement on se dit : « Ouais bon on s’est bien amusé mais elle restera une bonne copine… je me ferai une amie là où je suis maintenant ! »

GRAVE ERREUR !!!!

Le temps, qui fortifie les amitiés, affaiblit l'amour.  Jean de la Bruyère.
Une fois que l’on a essayé C², c’est l’adoptée ! (Hola toi homme à l’esprit mal placé je t’arrête tout de suite dans tes idées farfelues !) A chaque retrouvaille c’était comme-ci on ne s’était jamais quitté, pas de gêne, pas de silence pesant où au moins une demi-douzaine d’anges passe ! Que nenni, que dal, nada, niet !

L'amitié sans confiance, c'est une fleur sans parfum. Laure Conan.
Pourquoi elle et pas une autre ? Parce qu’on est complémentaire ? Parce qu’on aime la critique ? Parce que C² est une vraie pipelette et que moi j’adore écouter ? Parce qu’elle aime bien écouter mes aventures nanettiennes et aime en rire avec moi ? Parce que l’on n'est jamais méchante l’une envers l’autre ? Parce qu’on se soutient mutuellement ? Ou tout simplement parce qu’au fil du temps j’ai appris à avoir confiance en elle et inversement… à partir de là comme dirait les frères Borgdanoff en 3D : Rien n’est impossible !

Et voilà le mot de la fin, je le laisse à monsieur Soupault car il résume parfaitement la base même de ce qui fait durer l’amitié par delà le temps et l’espace et même dans les réincarnations passées et futures !

On ne pardonne pas à son ami ses erreurs, on ne les excuse pas non plus. On les comprend. Philippe Soupault, extrait de L'Amitié.

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PS de Nanette : Si vous me dites là maintenant faites un reproche à C² je dirais… heum… heu… En fait je viens de me rendre compte que  j’ai appris à aimer ses défauts !!!

PS de Nous : pour en finir avec les citations, nous ne pouvions passer à côté de ce texte qui résume absolument tout :) Ce n'est pas parce que c'est simplettement dit que c'est faux.